Transgrancanaria 2016

2 jours que nous avons atterri dans un petit coin de paradis – Gran Canaria -, à 4h30 de vol de nos grisonnantes contrées.
Le climat tempéré ici est parfait pour ce que nous sommes venus chercher ; une médaille de finisher sur cette course dont les images vues et revues depuis quelques mois, faisaient baver chacun de nous devant son écran.

D’un point de vue personnel, après être resté sur une grosse déconvenue en 2015, la Diagonale des Fous, j’y allais avec une envie toute légitime de .. Terminer !

Il est 5h45 ce samedi 5 mars lorsque le bus qui nous amène au point de départ de l’épreuve se stationne à Fontanales.
La journée commence fort, je transpire à grosse gouttes, j’ai froid, je me sens mal… Les derniers lacets dans ce foutu bus m’ont rendu complètement malade, je m’assois sur le trottoir, vidé.
Bon, bon, bon..

Il est 5h45 donc alors que nous devons partir à 7h. Et là, la question qui nous vient tous à l’esprit.. Pourquoi ? Mais pourquoi donc sommes-nous arrivés si tôt ??? On se caille en plus. (Enfin Ann qui est en collant a moins froid que nous autres).
Je participe à cette course, avec Ann et son mari Seb. Julie est aussi de la partie sur le 83kms. Pour moi, le schéma est assez clair, je pense faire la première moitié de course (montante) avec eux puis me laisser aller sur la seconde moitié.

La première heure de course est pénible car bien entendu, mon mal des transports (dont je ne savais jusqu’alors pas que j’y étais sujet) m’a affecté et je suis alors bien content que ce début de course soit aussi pépère dû aux nombreux bouchons auxquels nous sommes confrontés.
Ca doit d’ailleurs être une donnée commune à beaucoup de trails ça, les bouchons. Le but du jeu ? Amener un grand nombre de coureurs sur un chemin si petit qu’il est impossible de dépasser. Comprends pas.

Les bâtons sont dans le sac, je ne juge pas utile de les sortir avant Terror au 13ème km, où les choses sérieuses commencent !

Notre village de départ correspond au 45ème km des dingues qui sont partis hier soir à 23h pour affronter les 8000m de dénivelé du 125kms. il est donc tout à fait naturel de reprendre certains coureurs qui sont en course depuis plus de 8h.
C’est pour cette raison que nous rejoignons Anthony qui semble relativement frais. Quelques mots échangés, puis nous poursuivons. Plus loin, c’est Julie, partie plus vite que nous que nous doublons.
Plusieurs sentiers à flanc de montagne nous auraient permis d’admirer les lieux… C’était sans compter la météo, qui, en ce début de journée, et au nord de l’île, n’était pas avec nous.

Après un ravitaillement expéditif à Valleseco au km 7.5, c’est celui de Terror où il me semble qu’on prend plus notre temps avant d’entamer le gros morceau. 12kms de montée avant de replonger sur Tejeda.
La longue montée aurait été pour nous l’occasion là encore de profiter du panorama mais, en plus de faire frisquet, le temps est très couvert.
L’an passé, pour préparer la Diagonale des Fous, je n’avais pas utilisé les bâtons, interdits sur la course ; les premiers pas avec me donnent directement mal aux bras. Un mal pour un bien, tant qu’on a mal ailleurs qu’aux jambes, on pense moins à ces dernières, et on avance plus facilement.

Avant de redescendre de cette première difficulté, nous sommes accompagnés des premiers rayons du soleil. Enfin !
Et cette végétation luxuriante plus typique du nord de l’île – qui fait clairement penser à La Réunion – semble se disperser alors que nous sommes pointés à Cruz de Tejeda.
« Cruz de Tejeda » à ne pas confondre avec « Tejeda ». Etonnant, le point de contrôle est donc situé.. 3kms avant le ravitaillement. Pourquoi avoir fait ça, je me pose encore la question..
24,8kms – 4h28 – 352ème

A ce ravitaillement, nous y restons 10 petites minutes le temps d’enlever nos couches devenues inutiles avec ce superbe soleil bien en place.

Deuxième gros morceau à avaler, dont la pente est sensiblement identique à la précédente mais sur une distance plus courte.
Le point d’orgue de cette montée où nous croisons en haut de celle-ci des coureurs revenant sur leurs pas, est le « Roque Nublo« . Il faut effectivement aller jusqu’au pied de ce roc pour valider notre passage au point de contrôle.
35,9kms – 6h45 – 319ème

3kms faciles avant le ravitaillement. Je profite là encore pour jouer au yoyo avec Ann et Seb profitant de notre (tout relatif) train de sénateur, pour prendre un nombre conséquent de photos. Et chaque fois, il faut que je redonne un coup de collier pour recoller à mes Belges adorés 🙂

Ce ravitaillement de Garanon, lieu de départ du 44kms parti plus tôt dans la journée, est énorme. Et il y a là de quoi sustenter l’appétit et la soif de tout un peuple.
Quasiment 15 minutes de perdues ici. Je vois personnellement plutôt là 15 minutes d’économisées pour la suite car il s’agit de ne pas zapper les ravitos, sur un ultra.

Montée sèche au programme pour la suite des événements, avant de parvenir au point culminant de notre pélerinage, 1938m, où se situe un observatoire militaire.
Comme dirait Ann, ça ressemble aux murs qu’on peut trouver en Belgique, sauf que ça dure bien plus longtemps. En effet, c’est du costaud !
Nous profitons de nos derniers instants à 3 au sommet de la course pour immortaliser ce moment avant que je ne m’envole dans une seconde partie de course très descendante et dans laquelle je peux pleinement m’ exprimer, si on peut dire.
41,2kms – 8h05 – 291ème
Etonnament, nous avons repris quasi 30 places dans cette montée.. Sans avoir doublé une seule personne ! Probablement que certains se sont arrêtés plus longtemps que nous au ravitaillement.

En se souhaitant mutuellement bonne chance pour la suite, et alors que je n’oublie pas de dire à mes camarades, que s’ils me rattrapent et doublent, de bien s’assurer de prendre la clé de la voiture, je m’envole.
Sensations extraordinaires de liberté où j’ai clairement l’impression de voler au milieu de ces magnifiques sentiers propices à l’évasion. Je prends mon pied et reprends rapidement des concurrents qui me laissent passer. Les premiers « thank you » fusent, et il y en aura encore pas mal lors de toutes ces descentes.
Il y a toujours forcément des récalcitrants ; lorsque toutes les méthodes classiques se révèlent insuffisantes (les raclements de gorges, les pieds qui tapent un peu plus lourdement sur le sol, les « sorry »), il faut employer la manière forte, jouer des coudes. Il a fallu que je le fasse une fois ; un difficile qui ne voulait pas se laisser doubler alors que je trépignais derrière lui depuis un temps qui me semblait incroyablement long.. Débile.

Ces 10kms de descente, je croyais aisément les faire en – d’1h.
Il m’aura finalement fallu 1h10 car changement de décor, raréfaction des arbres, paysages arides et sec, et surtout.. Surtout.. Un foutu chemin pavé en lacets sur une distance impensable. Le rythme est alors retombé, les foulées n’étant plus assurées sur pareil chemin. Grrr..
Trop concentré sur mes pieds, j’en oublierais presque d’admirer la vue.

Tunte est atteint, c’est le ravitaillement. La fin de la descente a été plus agréable et a permis de « délasser » les jambes sur un parcours devenu plus roulant.
Ravitaillement express, je veux vraiment me donner à fond sur cette seconde partie.
51,8kms – 9h19 – 240ème
50 personnes doublées sur 10kms de descente. Bien !

La montée se profilant me semble ridiculement courte, en visualisant la coupe topographique de la course reprise sur mon dossard, je me dis 2 ou 3kms maxi. Sauf qu’après 2kms, et alors que je vois au loin d’autres concurrents, je ne suis qu’aux prémices d’une montée mal négociée qui m’aura mis un coup de moins bien. Je me fais d’ailleurs dépassé à 3 ou 4 reprises. « Qu’ils en profitent les bougres, c’est la descente derrière ! »

La descente s’amorce, je reviens aisément sur les quelques-uns m’ayant doublé plus tôt mais pas moyen de doubler ce gars, là devant moi, qui descend aussi vite que moi. Il m’impressionne même car c’est fluide et ça en devient même plaisant de le suivre car le voyant faire, je sais qu’il saura toujours prendre la bonne trace, que je me contenterai de suivre. Un groupe de 4 ou 5, encore un groupe de « difficiles », nous sommes bloqués derrière eux, mon prédécesseur se faufile sur le côté en prenant des risques que je n’ai pas osé réitérer. Et ces conn.. derrière qui je ronge mon frein, ne se poussent qu’après un long moment. Ca m’emmer.. clairement !! Je ne comprends pas le but de la manoeuvre, je ne demande pas qu’ils se foutent dans le ravin pour me laisser passer mais quand même quoi..

Mon chamois volant doit être bien loin après tout ça.. Oui, mais sans plus, je le rattrape. M’attendait-il ? lol
Et je le dépasse même, bizarrement.

Ayagures, ce village au nom chantant me voit arriver 46 places de mieux qu’au précédent pointage.
63,9kms – 10h59 – 194ème

Idem, je ne reste pas plus de 5 minutes, j’ai une vague hésitation sur l’installation de la frontale à ce moment-là. Il est 18h11, le jour baisse fortement dans 50′. Je me dis que c’est jouable, j’ai en tête de parvenir en bas de la prochaine descente (au préalable, il faudra monter pendant 3 bons kms) avant la nuit.
La montée se passe relativement bien, j’ai les jambes, et la perspective de monter à 6km/h, ce que je parviens à faire sur ce chemin large et très roulant, indique que j’assure, sauf accident, l’objectif des – de 14h.

Avant de basculer dans la descente, je vois là, sur un promontoire, 3 ou 4 gels.
Pardon ? Hein ? Quoi ? Plait-il ???
Des gels sur une course, on en voit oui, mon côté naïf veut toujours prendre le dessus en me forçant à croire que le propriétaire l’a malencontreusement perdu. Mais là, les utiliser, et les poser là, de manière totalement consciente, ça me répugne. Porcs !

La descente est horrible. Voilà, c’est dit. Un remake de La Corse…
On traverse, puis longe, puis retraverse une rivière asséchée consitutuée là encore, essentiellement de pierres. Ca tue les chevilles, c’est totalement déprimant. A cela s’ajoute la nuit qui s’abat inexorablement sur nous.
Je me dis que le prochain ravito, à 6kms de l’arrivée, me permettra d’y voir plus clair lorsque je daignerais me poser 30″ pour visser la frontale sur ma caboche. Et puis ce ravitaillement n’arrivant jamais, je me décide tout de même à m’arrêter, ce serait trop stupide, maintenant que je n’y vois quasi plus rien, et alors que je cherche à m’aider des frontales des autres, de me tordre la patte.

Fin prêt pour la nuit ! OK, ce sera court, il reste 7kms…

Le panneau 5kms est franchi, je tente de m’accrocher à un gars du 125 qui vient de me doubler (!) mais je commence à donner de sérieux signes de fatigue.
C’est roulant pourtant, mais quand t’es au bout du rouleau, y a plus rien qui roule.

Le ravitaillement est à 3kms de l’arrivée (rien à voir avec ce qui était prévu.. Et plus débile encore, pourquoi un ravitaillement à 3kms de l’arrivée ?)
Panneau 2kms. Je n’en peux plus, il faut que je marche. J’ai 80 bornes dans les jambes, il en reste 2 misérables, et je marche.. Pffff…
1km, il faut courir.

Un premier passage sous l’arche, il faut faire le tour, puis revenir vers l’arche finale. Ouf ! 13h20 à ma montre, je suis super satisfait. Mais défait 🙂

Le finish est dément, beaucoup de monde, une liesse constatée également tout au long de la course, dans les nombreux villages traversés. Superbe fiesta.
Le balisage, je n’en ai pas parlé. Incroyable balisage, ils vont mettre des jours et des jours pour enlever tout ça. Même ridicule par moment, quand, sur un chemin unique, avec la falaise sur ta gauche, et le ravin sur la droite, ils te collent un piquet avec une rubalise tous les 10m… Enfin, vaut mieux trop que pas assez.

Prix de la course excessif selon moi, malgré les cadeaux sympa (mais qui par ailleurs ne doivent pas leur coûter un peseta). J’ai eu pour plus cher d’inscription à la course que du vol A/R en avion (!!)

Bilan de la course : 177ème/618
Ann et Seb terminent en 14h30 en 263 et 264ème positions (récit écrit par Ann). Bravo aussi à eux ainsi qu’à Anthony, Quentin et Pascal tous 3 finishers du 125kms. Et Adriano, sur le 44.

2 réponses à “Transgrancanaria 2016”

  1. le chamois de Belgique a trouvé son alter ego aux canaries ! un vrai troupeau …
    je me pose toujours cette question : pourquoi on arrive à courir sur d’aussi longues distances et au final on marche toujours dans les derniers kms ? décompression mentale ? plus envie de se faire mal car on sait qu’on va finir ?
    Dans tous les cas , félicitations , la diag est maintenant derrière toi, de nouveaux exploits attendent juste d’être écrit.
    Ce fut un plaisir de suivre la course des madres sur le site de l’épreuve !

  2. BRAVO, BRAVO et encore BRAVO…..tant pour ton récit (toujours magnifique) que pour ta performance. Je ne me doutais pas que tu avais souffert sur ce parcours…..tu dois encore être plus fier de l’avoir terminé.
    Tu m’épates, tu m’épates, tu m’épates……
    Bisous de Maman

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